Les écrivains suisses francophones
au dix-neuvième siècle




La littérature suisse romande du dix-neuvième siècle — ou du moins ce que j'en connais — n'est pas riche. Tout semble avoir commencé dans les années 1830 avec Rodolphe Töpffer. Il semble qu'à peu près à la même époque Alexandre Vinet1 ait eu une grande influence, mais qu'il ait aussi écrit tout sauf de la littérature. Henri-Frédéric Amiel2 viendra ensuite et écrira aussi plus de la critique et un journal fameux que de la littérature.

On croise ensuite des écrivains suisses qui se sont exilés à Paris, comme Victor Cherbuliez ou Édouard Rod. Victor Tissot3 a aussi fait son stage à Paris, avant de s'installer en Suisse, de beaucoup voyager et d'écrire ce qui semble surtout être du journalisme et des récits de voyages. Puis viennent Charles Fuster4, Charles-Ferdinand Ramuz5, qui est peut-être l'écrivain suisse de cette époque le plus fameux, Marcel Rouff6, le poète Henry Spiess7 et le franco-suisse Guy de Pourtalès8.

C'est vers la fin du siècle qu'apparaît un débat identitaire qui oppose les écrivains qui prônent une littérature nationale avec un apport de culture germanique et l'influence du protestantisme comme fondement de l'identité romande, à ceux qui se veulent latins (Wikipédia). Au premier groupe appartiennent Gonzague de Reynold9 et Robert de Traz10, au second Alexandre et Charles-Albert Cingria11, quatre écrivains que je n'ai pas le plaisir de connaître. Mais tout cela est bien tardif pour le dix-neuvième siècle. Ensuite on arrive à Blaise Cendrars, mais ne sommes-nous pas en plein vingtième siècle?

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Ce qui me frappe chez plusieurs de ces auteurs, comme Rodolphe Töpffer, Henri-Frédéric Amiel ou Guy de Pourtalès, c'est que, bien que francophones, ils sont de culture et d'éducation allemandes. Plusieurs sont d'origine française ou vivront en France. La mère des frères Cingria est franco-polonaise, alors que celle de Robert de Traz est flamande. Ça doit être le paradoxe suisse d'être isolé dans sa neutralité, mais niché au coeur de l'Europe.

1 - Le lausannois Alexandre Vinet (1797-1847) était théologien, philosophe, journaliste, critique littéraire et historien.
2 - Henri-Frédéric Amiel (1821-1881) était originaire de Genève. Il a étudié en Allemagne, a beaucoup voyagé et est devenu professeur. Il a publié de la poésie, des critiques littéraires, mais est surtout fameux pour son Journal.
3 - Victor Tissot (1844-1917) a connu le succès et la célébrité grâce à un roman: Voyage au pays des milliards (1875).
4 - Charles Fuster (1866-1929) est né à Yverdon, a été poète, romancier et critique littéraire, mais semble avoir surtout publié en France.
5 - Charles Ferdinand Ramuz (1878-1947) a commencé sa carrière en France avant de la poursuivre en Suisse. Il a écrit romans, poèmes et essais.
6 - Marcel Rouff (1877-1936), qui a aussi beaucoup résidé et travaillé à Paris, a été romancier, poète, historien, biographe et essayiste.
7 - Henry Spiess (1876-1940) était poète et avocat.
8 - Guy de Pourtalès (1881-1941) semble être à moitié suisse, au tiers français et un sixième allemand. Il semble avoir surtout écrit de la non-fiction.
9 - Gonzague de Reynold (1880-1970) serait connu pour être le théoricien principal de l'helvétisme.
10 - Robert de Traz (1884-1951) semble avoir écrit autant des critiques littéraires que des romans. Son frère, Georges de Traz (1881-1980) est un écrivain de romans policiers sous les pseudonymes de Peter Coram et François Fosca.
11 - Si les frères Alexandre Cingria (1879-1945) et Charles-Albert Cingria (1883-1954) étaient écrivains, le premier a surtout été peintre et le second semble avoir surtout écrit de la non-fiction.



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