Louis Leforgeur quitte la ville de province où vit sa famille et s'installe à Mangues-la-verte, un petit village du centre de la France. Il y tombera amoureux d'une jeune paysanne pauvre et déconsidérée. Leur amour est en butte à bien des difficultés. Cet extrait nous le décrit. Louis Leforgeur était un être assez bizarre, plein de qualités et de défauts, et dont le caractère devait à l'excessive sensibilité de ses nerf quelque chose de féminin. Sa vie jusqu'à vingt-cinq ans avait semblé extérieurement endormie, car il ne quitta pas un seul instant sa famille, ne se lia jamais avec les autres jeunes gens, s'éloigna de tout le monde et passa ses journées dans l'étude et la solitude, sans s'inquiéter des accusations de sauvagerie qu'on portait constamment contre lui. Son père et sa mère remplissaient consciencieusement tous les devoirs et suivaient les pratiques de la vie provinciale. Assez riche, ils ne cherchèrent pas à destiner Louis à une carrière, et, dès l'enfance, le voyant aimer les livres, le silence et les recoins solitaires, ils le laissèrent aller à sa guise. Les livres contribuèrent singulièrement à développer l'esprit de Louis. Quand il se trouva ensuite rapproché du petit monde provincial, il éprouva une grande impression d'ennui et de dédain, et il fut impossible d'obtenir de lui le moindre rapport aimable avec les amis de la maison. S'il restait dans le salon, c'était uniquement pour noter minutieusement les ridicules et les travers des gens qui l'entouraient. Il prit ainsi l'habitude de ne point parler, de ne se mêler à rien, de concentrer toutes ses sensations en lui-même sans les communiquer. Il rêvassait continuellement. Mais tandis qu'il devenait très-dédaigneux, très-fier et en même temps très-sagace, le manque de commerce avec le monde, l'inaction, la solitude le rendirent timide, et dès que le moindre incident le mettait en cause il rougissait devant les personnes qu'il méprisait et perdait contenance. Etc. Edmond Duranty |
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