Duranty répond aux critiques d' ... Ces observations sont faits avec prudence, avec courtoisie, avec ironie et même avec mélancolie. Elles sont bien curieuses, si l'on songe à l'influence qu'exerce ce peintre sur la nouvelle génération sortie de l'École des Beaux-Arts. Encore plus curieuse, si l'on songe que cet écrivain, qui considère comme une marque de médiocrité la fidélité à reproduire les habits, le visage, les habitudes de nos contemporains, s'est voué et s'évertue à représenter les habits, les visages, les habitudes de qui? des Arabes contemporains. Pourquoi s'obstine-t-il ainsi à entraver la colonisation de l'Algérie? Nul ne le sait. Pourquoi les arabes contemporains lui paraissent-ils seuls dignes des préoccupations de la peinture? On ne le sait pas davantage. ... Ils s'efforcent d'y amalgamer toutes les manières; le ranci et le blafard des figures s'y étalent sur des colorations d'étoffes qu'on soutire maladroitement aux Vénitiens en les surchauffant jusqu'au criard, et en les amollissant jusqu'à les éteindre; on prend, il faudrait dire on chipe, à Delacroix ses fonds en les refroidissant et en les aigrissant; on bat ensemble du Carpaccio, du Rubens, et du Signol, peut-être casse-t-on dans le mélange un peu de Prudhon et du Lesueur, et l'on sert un étrange ragoût maigre et suri, une salade de lignes pauvres, anguleuse et cahotées, de colorations détonantes, trop fades ou trop acides, une confusion de formes grêles, gênées, emphatiques et maladives. Les recherches d'une archéologie en pleine mue, mais parvenue à un certain degré d'étrangeté, donnent seules un peu d'accent à cet art négatif et embrouillé. Mais l'archéologie n'est point à eux et ils la doivent aux archéologues. Si donc un art est bien impersonnel, ce n'est pas celui que décrivait le peintre-écrivain, mais c'est celui-ci. Toutes les conventions s'y donnent rendez-vous, il est vrai, mais tout y manque de ce qui est de l'homme, de son individualité, de son esprit. Etc. Edmond Duranty |
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