Dans ces contes à saveur symboliste, au ton philosophique, Schwob semble surtout être préoccupé d'enfance, de rêves, de vies brisées et de mort. Je ne sais comment je parvins à travers une pluie obscure jusqu'à l'étrange étal qui m'apparut dans la nuit. J'ignore la ville et j'ignore l'année; je me souviens que la saison était pluvieuse, très pluvieuse. Il est certain que dans ce même temps des hommes trouvèrent par les routes de petits enfants vagabonds qui refusaient de grandir. Des fillettes de sept ans implorèrent à genoux pour que leur âge restât immobile, et la puberté semblait déjà mortelle. Il y eut des processions blanchâtres sous le ciel livide, et de petites ombres à peine parlantes exhortèrent le peuple puéril. Rien n'était désiré par elles qu'une ignorance perpétuée. Elles souhaitaient se vouer à des jeux éternels. Elles désespéraient du travail de la vie. Tout n'était que passé pour elles. En ces jours mornes, sous cette saison pluvieuse, très pluvieuse, j'aperçus les minces lumières filantes de la petite vendeuse de lampes. Je m'approchai sous l'auvent, et la pluie me courut sur la nuque tandis que je penchais la tête. Et je lui dis : – Que vendez-vous donc là, petite vendeuse, par cette triste saison de pluie ? – Des lampes, me répondit-elle, seulement des lampes allumées. – Et en vérité, lui dis-je, que sont donc ces lampes allumées, hautes comme le petit doigt et qui brûlent d'une lumière menue comme une tête d'épingle ? Etc. Marcel Schwob |
Retour à Marcel Schwob
Vers la page d'accueil