Le Parfum des îles Borromées

Chapitre deux

La belle Carlotta fait sa lente apparition, venant du lac.

C'était une voix de femme pure et fraîche, avec des intonations d'enfant, parfois, et tout à coup des accents de passion si chaleureux que les auditeurs en étaient soulevés et haletants. Gabriel Dompierre se sentait une irrésistible envie de distinguer la chamteuse. Mais l'embarcation semblait grosse à peine comme une noix, par suite de l'éloignement; de plus elle entra promptement dans l'ombre que formait la montagne, et on ne la distingua plus.

Lorsque le silence retomba, et qu'il n'y eu plus de sensible que les petits soupirs étouffés des vcaguelettes mourantes au choc du sable ou des barques amarrées, le jeune homme se pencha vers des bateliers qui somnolaient en attendant l'heure des promenades en barques, au lever de la lune.
- Qui donc chante là-bas ? demanda-t-il.

...

- Celle qui chante, Signore, c'est Carlotta, d'Isola Bella. Elle est bien connue, Signore!
- Ah?
- C'est la plus belle fille du pays, Signore!..

...

Le chant reprit dans le lointain, juste au moment où la lune, se levant au dessus des montagnes de Luino, découvrait d'un coup la magnificence du lac Majeur sous le ciel clair. La branche septentrionale s'étendait en face, dans un infini comparable à celui de la mer; tous les monts bleuâtres découvrirent leur pur dessin, et l'anse des Borromées montra ses trois îles: Isola Madre, Isola Bella, et derrière celle-ci, la petite île des pêcheurs, presque invisible.

Etc.

René Boylesve
Le Parfum des îles Borromées
1898



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